"Sécurité" routière : les gendarmes sommés de faire du chiffre

Publié le par jack palmer

 Comment, les gendarmes seraient incités à distribuer les prunes ? La « lettre d’observation » suivante, datée du 18 juillet 2008, tend à confirmer ce que l’on supputait… Elle a été rédigée par un adjudant-chef, commandant une brigade de gendarmerie motorisée du département de Maine-et-Loire.
Chronique de la pression ordinaire

 La missive en forme de missile est adressée à un gendarme motocycliste. Le style, direct, est sans équivoque : « L’étude de votre activité pour le 1er semestre 2008 laisse apparaître un manque de travail évident, en opposition avec les objectifs fixés, tant par le gouvernement que par les différents échelons hiérarchiques. Ce manquement n’est pas acceptable et ne peut donc perdurer. »
 Son supérieur hiérarchique reproche au gendarme visé un manque de « zèle » dans le constat d’infractions routières…



CNFSR (Centre National de Formation Spécial Racket)

 « Je vous rappelle qu’en tant que gendarme motocycliste, vous devez sanctionner, sans état d’âme, les infractions graves génératrices d’accident telles, vitesse, alcoolémie, usage de produits stupéfiants (…). En conséquence, j’attends de vous, dès à présent, une motivation de tous les instants et une nette amélioration de votre façon de travailler. » Le sous-entendu est clair, ce gendarme ne distribue pas assez de PV en regard des « objectifs fixés », qui sont donc quantifiés.

Pas d’état d’âme !

 Son commandant l’enjoint à ne pas avoir « d’état d’âme » (c’est même souligné dans la lettre). A ne pas céder, autrement soit écrit, à la tentation d’être clément. Cette lettre ne correspond pas à une sanction mais le gendarme en question se voit tout de même dans l’obligation d’obtempérer. Sinon…

 Ce document prouve que les gendarmes motocyclistes sont sous pression. Une pression qui laissera forcément place à l’arbitraire quand le gendarme, sur le bord de la route, sera contraint de multiplier les procès-verbaux. Eloignant, au passage, la sanction de sa vocation pédagogique. Oui, ce fameux message martelé par le gouvernement, et même le président de la République…

 Le 18 juillet, la crise n’avait pas encore contraint le gouvernement à débloquer d’urgence des milliards d’euros pour sauver les banques de la faillite. Mais l’État avait déjà grandement besoin de la contribution forcée des conducteurs. Depuis, le déficit a empiré. Vigilance, donc, sur la route : les gendarmes ont l’obligation de faire du chiffre.

Nicolas Grumel - 28/10/2008


La « lettre d’observation »
La « lettre d'observation »

La « lettre d’observation » reçue cet été par un gendarme motocycliste.

Publié dans liberté

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